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Il y a presque vingt ans, un groupe armé entre dans la maison
familiale et massacre son père, sa mère, ses deux frères et sa petite
soeur. Corneille se cache. Il a 16 ans et réussit à s’enfuir.
«
J’étais le seul à avoir survécu. Je me suis demandé : “Pourquoi juste
moi ?” J’avais grandi dans une famille catholique où Dieu était une
évidence. Devant les atrocités dont j’avais été témoin, je me suis
interrogé. Dieu miséricordieux ne peut pas vouloir ça. S’Il existe et
qu’Il est tout-puissant, pourquoi n’a-t-Il pas empêché le génocide
rwandais ? » Cette question restera enfouie pendant des années, comme
s’il y avait un réel danger à se la poser.
« Je n’étais pas capable de l’affronter. Je crois que j’avais peur de la réponse, peur d’être déçu. Comme un enfant qui ne veut pas découvrir que son père est un salaud… »
Au Québec, où il s’installe, Corneille renoue avec sa passion, la musique. En 2002, il se fait remarquer aux Francofolies de La Rochelle. Son premier album, Parce qu’on vient de loin, rencontre le succès. Les médias s’emparent de son histoire, qui émeut le public. « Avec le recul, je me suis rendu compte que je n’avais pas vraiment goûté ce succès. Tout m’était dû, à moi, la victime. Mon malheur me donnait des droits. J’avais trop souffert pour ne pas voir dans la réussite une sorte de retour d’ascenseur obligatoire. »
En 2009, un nouvel opus, Sans titre, sort. C’est le flop. « Je ne comprenais pas : moi, le rescapé, je pouvais me planter ? Impossible ! J’attendais tellement que la vie me rembourse sa dette que tout échec était inenvisageable ! »
Corneille va réapprivoiser le mot pardon. « J’ai parlé à un psy. J’ai découvert que j’avais le droit de me pardonner d’être en vie. Ma vie spirituelle s’est renouvelée. Je ne crois pas que Dieu soit cet être pervers qui laisse les massacres se perpétrer sans agir. Sans doute n’est-Il pas tout puissant, comme on l’imagine. Je suis enfin sorti d’une relation de troc avec Lui : ce n’est pas parce que j’ai souffert qu’Il me doit quelque chose. Avant, je Lui disais sans cesse : “Tu ne me donnes pas assez.” Aujourd’hui, je Lui dis : “Merci.” Il est l’amour. Un amour qui guérit, même les pires blessures. Je Le prie chaque matin. »
Avec sa femme, Corneille a enfin pu ressortir les photos de sa famille. « Lorsque je regarde mon fils, j’aperçois en filigrane mes parents, mes frères, ma soeur. J’ai l’impression que Merrick me dit : “Un jour, on ira là-bas. Le Rwanda, c’est chez nous.” » Corneille ajoute : « Je suis heureux. Je peux m’autoriser à le dire. Enfin ! »
« Je n’étais pas capable de l’affronter. Je crois que j’avais peur de la réponse, peur d’être déçu. Comme un enfant qui ne veut pas découvrir que son père est un salaud… »
Au Québec, où il s’installe, Corneille renoue avec sa passion, la musique. En 2002, il se fait remarquer aux Francofolies de La Rochelle. Son premier album, Parce qu’on vient de loin, rencontre le succès. Les médias s’emparent de son histoire, qui émeut le public. « Avec le recul, je me suis rendu compte que je n’avais pas vraiment goûté ce succès. Tout m’était dû, à moi, la victime. Mon malheur me donnait des droits. J’avais trop souffert pour ne pas voir dans la réussite une sorte de retour d’ascenseur obligatoire. »
En 2009, un nouvel opus, Sans titre, sort. C’est le flop. « Je ne comprenais pas : moi, le rescapé, je pouvais me planter ? Impossible ! J’attendais tellement que la vie me rembourse sa dette que tout échec était inenvisageable ! »
Un soir d’été 2010, Corneille est chez lui. « Je me lamentais de l’échec de ce disque, j’en voulais à la terre entière. Ma femme et mon petit garçon de 3 mois étaient assis en face de moi. Je les ai regardés et j’ai eu comme une illumination. J’ai pensé à Dieu et je me suis dit : “Cette prétendue dette, Il me l’a remboursée !” Pour la première fois depuis la mort de ma famille, j’ai osé dire merci à Dieu… L’amour m’a sauvé. »
Corneille va réapprivoiser le mot pardon. « J’ai parlé à un psy. J’ai découvert que j’avais le droit de me pardonner d’être en vie. Ma vie spirituelle s’est renouvelée. Je ne crois pas que Dieu soit cet être pervers qui laisse les massacres se perpétrer sans agir. Sans doute n’est-Il pas tout puissant, comme on l’imagine. Je suis enfin sorti d’une relation de troc avec Lui : ce n’est pas parce que j’ai souffert qu’Il me doit quelque chose. Avant, je Lui disais sans cesse : “Tu ne me donnes pas assez.” Aujourd’hui, je Lui dis : “Merci.” Il est l’amour. Un amour qui guérit, même les pires blessures. Je Le prie chaque matin. »
Avec sa femme, Corneille a enfin pu ressortir les photos de sa famille. « Lorsque je regarde mon fils, j’aperçois en filigrane mes parents, mes frères, ma soeur. J’ai l’impression que Merrick me dit : “Un jour, on ira là-bas. Le Rwanda, c’est chez nous.” » Corneille ajoute : « Je suis heureux. Je peux m’autoriser à le dire. Enfin ! »
Source : Psychologies Magazine